“Artiste” et “féministe” sont deux mots que font rimer la langue française et Hélène Bertaux.
A l’occasion du 8 mars, Journée internationale pour les droits des Femmes, le Cidff de la Somme a souhaité mettre en lumière les artistes femmes et a sollicité le Carmel d’Abbeville et le Musée de Picardie. Des visites guidées ont été organisées au musée de Picardie les 8 et 12 mars après-midi. Lors de ce parcours au musée, nous avons pu contempler des œuvres peintes ou sculptées par des femmes. Dans cet article, vous allez pouvoir en apprendre un peu plus sur l’une de ses artistes, Hélène Bertaux.
Hélène Bertaux est une sculptrice française du XIXe siècle. Elle est née à Paris le 4 juillet 1825 et décédée à Saint-Michel-des-Chavergne le 20 avril 1909. Elle a milité pour la féminisation du monde artistique et reste une actrice majeure du mouvement de libération des femmes dans le monde de l’art. Son premier mari était Augustin-François Allélit, sculpteur français de thèmes religieux et décorateur d’horloges. Après leur séparation, elle s’installe avec son nouveau compagnon, Léon Bertaux, qu’elle épouse en 1866 après le décès de son premier compagnon. Elle commence à exposer au Salon* en 1849 sous le nom d’Hélène Allélit, puis à partir de 1854 sous le nom de « Madame Léon Bertaux ».
Sa passion s’est dévoilée assez tôt, à ses 12 ans, elle apprend aux côtés de son père, lui-même sculpteur et réparateur de plâtre. Son apprentissage se complète par Augustin Dumont, lauréat du Grand Prix de Rome en sculpture et professeur à l’École des Beaux-Arts.
Entre 1840 et 1855, elle réalise plusieurs commandes qui ont pour sujet la décoration de pendules. Elle bénéficie de l’appui de Victor Paillard (bronzier et sculpteur français), ce dernier lui achète des œuvres d’art en nombres. Elle côtoie également de grands sculpteurs de l’époque tels que Jean-Jacques Pradier ou même Antoine-Louis Barye. De plus, elle entretient une relation privilégiée avec l’empereur Napoléon III, l’impératrice Eugénie et la Princesse Mathilde Bonaparte.
Vers 1860, elle se met à réaliser de plus grandes œuvres, de plus grands formats qui ont pour thème la religion et la mythologie.
En 1863, elle obtient une mention honorable grâce à son exposition au Salon où elle y a installé un grand relief en bronze, l’Assomption de la Vierge, aujourd’hui exposé au musée de la Cohue à Vannes.
En 1864, elle s’affirme comme une véritable statuaire professionnelle. Elle a réalisé un nu, Jeune Gaullois captif, grâce à quoi elle obtient sa première médaille au Salon.
La sculptrice a été rendue particulièrement célèbre suite à la réalisation d’une commande privée d’une fontaine monumentale à Amiens (appelée Fontaine de l’Herbet, du nom de son mécène), commencée en 1863 et achevée en juillet 1864.
Cette fontaine colossale, aujourd’hui disparue, a une histoire plutôt mouvementée. À l’époque, les Amiénois se plaignent de l’odeur qu’elle dégage. En 1877, elle est peinte en blanc, mais cette couleur ne parvient pas à camoufler l’odeur. Pour remédier à cela, elle est même recouverte quelque temps plus tard d’un enduit rose. En 1888, elle est transférée dans les petits jardins du boulevard de Belfort, afin de laisser la place nécessaire à la construction du Cirque place Longueville. En 1928, le rocher se fend, et la naïade oscille dangereusement. Cette dernière sera alors posée sur le parterre. Elle y restera pendant des années dans l’ignorance la plus totale. Elle disparaît totalement le 24 décembre 1941, enlevée et fondue par les autorités allemandes, en application de la loi du 11 octobre 1941. Cette loi, émise par Philippe Pétain, avait pour conséquence la refonte de statues et de monuments à des fins de réarmement.
À la suite de ses années de travail intense, Hélène Bertaux quitte Paris pour finalement revenir dans la capitale en 1873. À son retour, sa réelle ascension commence.
Elle commence par remporter une première médaille suite à l’exposition de sa sculpture Jeune fille au bain, de 1873. C’est une médaille de première classe et qui est acquise par le ministère de l’Instruction publique et des beaux-arts. Par la suite en 1889 et après de longues années de réflexions, elle réalise ce qui lui vaudra une médaille d’or, le Psyché sous l’empire du mystère. Ce qui signifie aussi que son art est en évolution, elle se dirige vers plus de simplicité et de sobriété. C’est la première sculptrice à obtenir une consécration officielle pour une œuvre. C’est une avancée immense dans la reconnaissance du statut artistique des femmes. En effet, cela va permettre d’ouvrir les premiers cours de modelages aux femmes. Hélène Bertaux devient alors professeure et ouvre une école six ans plus tard.
En réponse à son succès, elle crée l’Union des Femmes Peintres et Sculpteurs en 1881.
Par la suite, ses avancées s’enchaînent.
En 1887, elle obtient l’ouverture de l’École des Beaux-Arts ainsi que la mixité du Grand Prix de Rome, mis en place en 1903 officiellement.
En 1894, elle se retire de l’Union suite au refus de ses deux candidatures à l’Institut. Malgré ses titres d’Officier d’Académie et d’Officier d’Instruction publique pour service rendu aux arts en tant que professeur libre.
Hélène Bertaux demeure une figure emblématique des droits des femmes dans le milieu artistique. Les droits des femmes restent un combat de chaque jour dans n’importe quels domaines, que ce soit dans le milieu de l’art comme celui du travail, par exemple. C’est grâce à des personnalités comme celle d’Hélène Bertaux que les femmes ont pu avoir accès à des domaines exclusivement réservés aux hommes et que les générations qui ont suivies ont trouvé l’impulsion de poursuivre la lutte pour l’égalité.
« Le temps n’est pas loin je l’espère, où nous aurons notre École des Beaux-Arts presque semblable à celle des hommes, et nous offrant, avec les mêmes protections, les mêmes chances de distinctions ». Hélène Bertaux
*Les Salons sont définis comme des manifestations annuelles lors desquelles des artistes présentent au public en un même lieu des œuvres préalablement examinées et acceptées par un jury.